Le directeur exécutif de l’IRPAD a averti que les technologies émergentes représentent un risque pour la souveraineté des données en Afrique.

Addis-Abeba, le 3 octobre 2025 (ENA) : - L’Afrique doit relever d’importants défis de développement dans un contexte de ralentissement économique et de mutations technologiques, a averti Mamadou Goïta, directeur exécutif de l’IRPAD.

 

Selon lui, l’essor des technologies émergentes, notamment l’intelligence artificielle, menace directement la souveraineté des données du continent.


 

Intervenant lors d’une conférence de presse organisée en marge de la Conférence panafricaine sur l’avenir des technologies biologiques dans l’alimentation et l’agriculture, il a souligné le rôle central que jouent des données fiables dans la planification, la gestion des ressources et la prise de décision.

 

Il a mis en garde contre un phénomène qu’il qualifie de « colonialisme des données », où des acteurs étrangers contrôlent la collecte et l’exploitation des données africaines, au détriment du continent.


 

« La plupart de nos données appartiennent à des entreprises extérieures, ce qui représente une menace sérieuse pour notre souveraineté », a-t-il affirmé, appelant à la mise en place d’un cadre réglementaire robuste pour protéger les intérêts africains. Dans ce sens, l’IRPAD travaille avec l’Union africaine à l’élaboration d’outils d’évaluation et de lois types pour aider les États à renforcer leur cadre juridique.

 

Goïta a rappelé que seuls 16 pays africains disposent actuellement de lois sur la protection des données, tandis que 24 autres sont encore en cours d’élaboration.


 

Il a également insisté sur l’importance de la mobilisation citoyenne et du renforcement des capacités, afin de sensibiliser les communautés locales, en particulier les agriculteurs et les peuples autochtones, aux enjeux liés à ces technologies.

 

De son côté, Million Belay, coordinateur général de l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique (AFSA), a noté que la numérisation fusionne biologie et numérique, une évolution considérée par certains comme bénéfique, mais qui pose de sérieuses questions de pouvoir et de contrôle.

 

Il a souligné que les agriculteurs africains, principaux fournisseurs de données, n’en tirent aucun bénéfice, les infrastructures et les droits de propriété intellectuelle étant détenus par des entreprises étrangères.


 

Sabrina Masinjila, experte en justice alimentaire au sein de la Société pour le développement international, a pour sa part mis en garde contre l’appropriation des savoirs traditionnels et du patrimoine génétique africain à travers la numérisation, appelant à des mécanismes de protection solides.

 

Barbara Ntambirweki, chercheuse au groupe ETC, a insisté sur la nécessité de placer les agriculteurs au cœur du développement technologique et de valoriser les savoirs autochtones, souvent négligés dans les politiques actuelles.


 

Enfin, Jim Thomas, du Fonds européen pour l’intelligence artificielle et la société, a rappelé que l’Afrique, qui abrite 42 % de la jeunesse mondiale, est devenue une source majeure de données pour les entreprises d’IA.

 

Il a appelé à engager la jeunesse africaine dans les débats sur l’avenir numérique et ses répercussions sur la santé, les droits numériques et la souveraineté alimentaire.

 

La Conférence panafricaine sur l’avenir des technologies biologiques dans l’alimentation et l’agriculture se poursuit pour trois jours, la deuxième journée ayant été consacrée à la question cruciale de la gouvernance des données.

Agence des nouvelles éthiopienne
2023